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CHARLY  dit  "ZIGOUIOUI"
25 août 2019

"Je ne plie le genou devant rien, ni personne : j'ai de l'arthrose."

 

"Peut-être suis-je myope et un peu sourd, comme tout critique qui se respecte."

 

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Quelle heureuse surprise ! La mine déconfite de ma vieille me rassure, je n'ai pas la berlue. On vient de dérober son lac préféré, tout ce chemin pour rien, oh ! comme c'est dommage... La gueule encore toute ébouriffée d'avoir sombré dans un sommeil chaotique, j'attends que le hayon se referme sur moi et que l'on rentre au bercail. Mais c'est à mon tour d'être contrarié qu'on me fasse mettre pied à terre. Fort heureusement à proximité du parking, une navette nous attend pour nous déposer quelques kilomètres plus loin. Hélas, je n'ai pas pu me rendormir. La conduite brusque et nerveuse du chauffeur m'a obligé à me focaliser sur son beau chapeau orné de plumes qui s'éventaient, plutôt que sur la route que je croyais quitter à tout instant. Ce ralliement à ce beau panache ne m'a valu que des nausées. Un coup de frein soudain mais salutaire nous ouvre les portières juste à temps ! Une grande bouffée d'air frais me fouette évitant ainsi que je ne répande ma bile sur les genoux de la vieille. Débarrassé momentanément de ma contrariété, je jette un oeil alentour, un peu inquiet. On nous a déposé au terminus d'une de ces belles vallées de la Zillertal, qui se termine bien souvent en cul de sac. La vieille a changé ses plans et refuse de se promener au bord du lac asséché pour cause de travaux. Jusqu'au-boutiste, elle préfère encore aller plus loin quitte à être dans l'impasse !

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Le torrent a perdu de sa superbe, il est à plat et file tout droit lové au creux de son lit, abandonnant ses alluvions, trésors accumulés dans sa descente effrénée. Il semble à bout de souffle et peine à regagner le lac, il tombera de haut en le découvrant asséché. Notre route s'étire en longueur et fait des méandres se refusant à n'être qu'une voie sans issue. Elle n'en finit pas d'en finir, alors qu'au loin l'ombre et la lumière font le cirque. Je me demande ce que ça cache ? Pour tromper mon inquiétude, je profite du paysage de chaque côté de mes flancs qui se creusent ; une petite faim sans doute !! Sur ma gauche, tout près de moi, les sapins en rangs serrés entament l'escalade du versant le plus ombragé, me laissant juste un talus herbeux pour y laisser ma trace et humer quelques parfums nouveaux. Le cours d'eau a choisi le versant opposé, chauffé par le soleil. Chaque creux, chaque entaille que le temps a sculpté dans la montagne, est propice aux eaux vives. Tout au long de l'hiver, un jeu de piste mal balisé, les a égarées. Le torrent affaibli vient, avec hâte, les accueillir dans son lit. Les cascades et les flots s'entremêlent, grondent et rugissent du plaisir de se retrouver enfin.

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Droite

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Nous sommes arrivés au fin fond. J'entre dans cette arène baignée de lumière, mais tout cela n'est que trompe l'oeil ! Je suis au bout du bout qui n'en est pas un. Mon chemin, plus étroit, s'etait faufilé derrière les sapins à ma gauche sur une courte distance et j'ai bien failli le manquer. La forêt dense monte la garde et nous stoppe net dans notre progression. Devant nous un menhir se dresse et porte bien haut un écriteau, que je soupçonne être un avertissement du genre "interdit", ce qui aurait bien arrangé mes affaires... Mon pote nous en fait la lecture, je n'ose y croire : Kässeler Hûtte ! Tout de suite, j'ai ressenti la magie des lieux, ça me parle... Mais s'en vient l'empêcheur de tourner en rond qui hésite et fait la fine bouche, j'hallucine ! Ça fait déjà une heure et demie qu'on marche tout ça pour atteindre le trou du cul du monde et maintenant qu'on arrive enfin ou presque, à quelque chose d'interessant, la vieille se fait prier. Bon sang de bois v'là qu'elle minaude alors que nous sommes si près du but pour nous empiffrer. Évidemment qu'on n'est pas venu jusqu'ici, pour déguster une spécialité alsacienne !! Mais revisitée à la mode autrichienne, moi, personnellement, quand à moi-même, je dis qu'il faut saisir les opportunités. Elle veut savoir si on en a encore sous le pied et pour combien de temps, bla-bla-bla... On est venu pour randonner, oui ou non ? Elle n'a qu'à longer les bois et suivre son idée fixe : grimper ! De mon côté, je suis prêt à tous les sacrifices, y compris celui d'être ballotter derrière son dos. Je retiens mon souffle, mon pote se retourne et répond : banco ! La chance est avec moi. Du haut de mon observatoire je vais guetter l'apparition de ma Hütte, car je veux être aux premières loges pour la dégustation.

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Le coeur joyeux et plein d'enthousiasme sur ce joli chemin muletier, je ne ménage pas ma peine secouant ma vieille comme un prunier, toujours derrière son dos je l'encourage à la persévérance. Ma table m'attend à 2279 mètres. Un autre cirque, orné de sommets enneigés me nargue au loin, pourvu que ce ne soit pas une apparence trompeuse. Le terrain est pavé de bonnes intentions et j'y crois dur comme fer. Soudain des voix nous parviennent d'un peu plus haut. Deux tyroliens en culotte de peau, avec pour seul bagage un long bâton en bois plus grand qu'eux, dévalent notre sentier avec l'agilité des cabris. La vieille qui a de la suite dans les idées, les interpelle et baragouine pour avoir quelques compléments d'informations. De suite, ils me confirment par quelques caresses que je suis apte. Un teckel fait le taf sans problème, je peux le prouver à tout instant, il suffit que je mette pied à terre ! Vient le tour de mes deux compagnons, ils sont jaugés de haut en bas. Les deux autrichiens se concertent puis rendent leur verdict : pour des "alt*" non montagnards, il faut compter encore deux heures pour toucher au but ! Ils disparaissent bien vite après avoir jeté un froid sur notre trio. La chance me tourne le dos, mes vieux ne tiennent pas la route et veulent y réfléchir en faisant une pause. Deux heures que l'on marche, le compte est vite fait : quatre aller, quatre retour et je ne parle même pas de la pause gastronomique...La navette ne nous attendra pas ! Alors on s'est installé pour un piquenique qui manquait de hauteur...gustative. Mais pour un teckel nain, je ne pouvais rêver mieux que ce belvédère qui a, l'espace d'un moment, fait de moi, le roi du monde !

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Notre enthousiasme a été mis à rude épreuve, le retour nous a pris un peu moins de temps qu'à la montée. J'ai préféré rester dans mes appartements car le fumet de ce Kässler me harcèle encore alors que je peine à digérer ma frustration. La vieille est contrariée, ses photos sont toutes floues à cause de mon remue-ménage. Elle en a plein le dos et m'a refilé à mon pote. Après avoir terminé d'engranger ses souvenirs pour la postérité, elle nous a rattrapé en toute hâte. Un long silence s'installe et me berce. De retour dans la vallée, changement de décor ! Les pâturages sont pris d'assaut. Un grand troupeau de laitières est à pied d'oeuvre pour tondre les flancs de la montagne. L'herbe est grasse et repousse bien vite sur cette terre humidifiée en permanence. Ça cascade de tous côtés pour nourrir le torrent. Il se gonfle de suffisance, ramassant sur le bord de son lit qui voudrait s'y aventurer. Les vaches au pied montagnard en prennent à leurs aises, empiétant sur le terrain des biquettes qui se sont exilées un peu plus bas. Elles forment des petits groupes, chaque clan investit une grande pierre plate chauffée par le soleil. Et ça bavarde, vautrées, l'oeil critique sur ceux qui bossent. 

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J'ai veillé au grain derrière le dos de mon compagnon, des fois qu'on aurait égaré not'vieille ! Tout ça pour rien, mon pote dit que les attachiantes ne se perdent jamais...L'appétit vient en mangeant et le petit peu consommé sur les hauteurs me laisse comme toujours sur ma faim. J'avais beau me creuser la cervelle, impossible d'y trouver une idée nourrissante. Mon ventre vide me prend la tête. Il ne reste qu'une alternative, mettre pied à terre et aller où mes pas me portent. Ils savent où ils vont et je peux m'y fier...J'ai su en traversant la terrasse de la Grüne-Wand hütte que j'avais toutes mes chances...Mon pote, dans mon sillage, peine à me rattraper, s'engouffrant ainsi dans mon piège savamment planifié (Ok, y'a peut-être aussi, une petite part de hasard là dedans, vous allez pas chipoter !) Bref, je n'avais plus qu'à laisser les choses s'ajuster, ça n'a pas été sans mal. Mon pote me rattrape et m'asservi mais il est au bout de ma laisse... Distrait, il hume le fond de l'air avec gourmandise, la patronne survient à point nommé et reçoit dans la foulée une invitation à la pause café, en attendant l'arrivée de la navette. Mais la rusée nous a vus venir de loin et j'ai bien cru qu'elle allait nous priver de dessert. Fort heureusement, il y avait juste sous leur nez, deux autochtones en pleine dégustation d'un kaiserschmarren, de quoi les appâter !! Et l'on a cédé unanimement à notre péché mignon. Affairé à recevoir mon dû, j'ai peut-être manqué de réflexe alors que la navette s'éloignait avec nos deux voisins de table à son bord. Pendant que mes vieux, toujours assis, contemplaient béatement le paysage, je les ai fixés un long moment d'un oeil interrogateur, ma bedaine repue, vautrée sur le sol entre mes deux pattes. Le piège s'est, cette fois, refermé sur moi. Trahi, je vous le donne en mille, par mon pote, qui extatique, s'est exclamé : "J'ai trop mangé !" en caressant son ventre. L'ancêtre a sournoisement profité de cet instant d'abandon. "Et si on se faisait une petite marche rapide jusqu'au parking, histoire de faire passer tout ça ?". Comme on ne m'a rien demandé, je précise "J'n'ai pas de soucis de cet ordre là moi madame ! Vous irez sans moi !" Ils m'ont rapatrié "chez moi" sans ménagement pour que je puisse y bouder tranquille. Et bras dessus, bras dessous, en avant pour les sept kilomètres restants, je vous fais grâce du demi et on n'a pas chômé...

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À part une petite halte au bord du torrent pour se rafraîchir, nous avons allégrement avalé la moitié de notre parcours. J'en ai d'ailleurs profité pour retrouver le plancher des vaches, juste le temps d'arroser quelques fleurs. J'ai pris conscience qu'ils pouvaient fort bien se passer de moi aussi ai-je regagné mes appartements. Je me suis assoupi et bien sûr, loi de l'emm.... maximum, des meuglements m'ont bien vite tiré de ce premier sommeil. Je mets ma truffe dehors pour voir ce qu'il en est et mon poil se hérisse,j'ai eu une grosse frayeur, comme mes vieux ! Une cavalcade de bestiaux pressés se rue sur nous en droite ligne de la montagne et déboule sur notre route sans même nous calculer. Les vaches nous doublent, sans aucun respect pour notre priorité et comme nous ne faisons pas le poids, on a fait profil bas sans même rouspéter ! J'ai dû me remettre au boulot et surveiller les arrières de ma vieille, c'est à dire... moi !! Hors de question que je perde la vie, j'avais déjà perdu le sommeil. Garde toi à gauche, garde toi à droite, de tous côtés, les ruminantes surgissent et nous pressent, elles se sont données le mot, c'est l'heure de pointe... Certaines refusent de rentrer dans le peloton et prennent des chemins de traverse, tout en nous jetant des regards en coin des plus inquiétants ... Finalement, après avoir louvoyé à nos risques et périls dans les embouteillages, nos chemins se sont séparés. Elles ont bifurqué vers deux ou trois étables environnantes tout en beuglant du retard de la traite. Notre parking était encore loin, mais visible, cette balade sur le dos de ma vieille m'a épuisé. J'ai un moment songé à marcher un peu pour étirer mes muscles endoloris mais rien qu'à y réfléchir, je sentais fondre mes précieuses réserves... Je mettrais pied à terre la prochaine fois, si mon ventre et ma tête tombent d'accord ...

 

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 "J'écoute mon corps, il me parle sans répit"

 

 

 

 

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